La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
Vue d’une toilette le pot à eau miroite les souches du toit dans la cuvette
de la chanson on entend la traversée des paroles sans les voir
Georges Braque peignant sans freiner
renverse les cubes d’un rire en cage d’ascenseur
qui maintient les oiseaux à leur place
La page est cornée sans différence
alea jacta est
l’étable tient la chaleur animale sans que la musique à la mode influe sur les mots
La vie aborde un virage en se gardant de mettre le mode d’emploi dans la boîte. C ‘est bien vrai comme dirait la Mère Denis, cette fois le produit est réellement nouveau.
Dernier jour. Homme, c’est vrai : De tout ce qui a été, Rien n’a changé. En haut, tourne le même ciel, En bas, s’étend la même terre. Mais un chant a surgi, au large, Profond et mystérieux, au large. On dirait que, dans les profondeurs, les cercueils Ont cédé et que s’en sont envolés Vers le ciel d’innombrables alouettes. Homme, le jour du jugement Est pareil à tout autre jour. Fais plier tes genoux, Tords-toi les mains, Ouvre les yeux, étonne-toi. Homme, je t’en dirais bien davantage, Mais c’est en vain… D’ailleurs, des étoiles se lèvent Et me font signe de me taire. Et me font signe de me taire.
Lucian Blaga
Dans la grande traversée (In marea trecere, 1924) – Traduit du roumain par Philippe Loubière.
A tenir la flamme au moment où elle tremble, entre rouge et bleu jaune, pour voir dans le tamisé palpiter le poitrail de sa pensée, sur la table les larmes de la première rose, au fond de la guitare tenant le murmure, oui l’ocre et les autres de Braque plus vivants que nature, le fruit gonflé du sein tombé de l’aisselle et sur le green du ventre le trou du nombril au-dessus de la parcelle des meules, il se pourrait qu’un papillon écrive un vers à soie, rien quand fermant les yeux pour se laisser guider par les doigts, humide truffe canine qui siffle au loin, un châle plus long que le mollet lèche la pose du corps face au chevalet comme au printemps d’une vie que le palais goûte, ému, innocent, prêt à s’imaginer encore pour battre le déboire et refaire vendanges, il n’y a pas d’odeur sans femme à bord, la mer anémone son langage et note en Epoque son passage, les estrans dans la marge, pour accrocher la maison d’oiseau dans la baie du bocage, faire qu’il reste au moins deux enfants pour continuer à en faire d’autres disent les marelles…
Puis quand il fait plus noir, que la pluie bouffe comme un chancre, poser son imperméable, au milieu des bougies solaires, une boite de jazz pour cache-misère ça vous habille un sans-abri de cotonnades respectueuses et de sourires à votre égard.