La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
De cette mousse que la nuit les fourmis déplacent dans le bac à sable de l’enfant, je me tire pour trouver le suint d’un brame
La poule faisane se détourne du fusil comme une plaque de village corse en entrant en période des châtaignes
Que d’ocres le feu de mes tomettes cherche à sortir d’une histoire qui fait un tabac sans m’avoir fait autrement que fuir
Comme le papillon se déplace sans autre idée en tête que de mettre de la couleur sur la nappe grise, le peintre travaille follement pris entre la famine et la boulimie du peint
Un poète dans son jardin possède des cailloux qui boutonnent l’arbre à soie d’un chemin décousu à l’espoir de gagner la foi laïque d’éclairer la misère d’un chant d’amour…
En bonus à La mémoire qui chante, voici le deuxième épisode d’une suite d’anecdotes chansonnières que je me suis engagé à vous livrer jusqu’à la clôture, le 27 août, du financement participatif de ce livre à paraître à la mi-octobre (et dont les noms des contributeurs, je le rappelle, figureront dans l’édition originale – et seulement celle-ci…). Après Anne Sylvestre, la mémoire me chante en compagnie de Jean Vasca.
« C’est un matin d’été sans doute imaginé », dit la chanson. Merveilleuse chanson que celle-ci, au demeurant, la première de l’album éponyme de 1981 : Matinale… À vrai dire, c’était plutôt un après-midi d’été improvisé – en tout cas pour moi. Avec ma chère et tendre, nous étions de passage chez les Vasca, à l’époque où ils prenaient leurs quartiers d’été dans un superbe village préservé des estivants et de la société de consommation nommé Tharaux. Une sorte de nid d’aigle perdu dans les Cévennes, où s’achevait en cul-de-sac la route départementale. Un piton rocheux et à côté les gorges de la Cèze… Les habitants ? Moins de cinquante, peut-être, en ce milieu des années 1980.https://www.youtube-nocookie.com/embed/kZuYbLeLk1Q?wmode=transparent
Nous y étions venus la première fois en juillet 1982, en vue de « son » dossier de Paroles et Musique à paraître en septembre. Cette fois, on avait simplement prévu d’effectuer un crochet sur la route des vacances. Retrouvailles pour le déjeuner, après un départ de bonne heure depuis la région parisienne. Le déjeuner ? Une fête plutôt, une célébration du palais, comme toujours avec Vasca, excellent cuisinier et amateur de bonne chère et de vins fins… Après ça, reprendre la route, surtout par cette chaleur, rien que d’y penser… « Comment ça, reprendre la route ?! s’insurge Vasca. Pas question, vous passez la nuit ici. D’ailleurs, on m’attend cet après-midi à Alès pour une conférence-débat sur la chanson et j’ai annoncé que Fred y participerait avec moi. »
Ah bon ? Sympa… de me prévenir au dernier moment ! Grrrr… Moi qui me voyais déjà en vacances, j’allais retourner au turbin ! Pas moyen de faire la moindre infidélité à Madame la Chanson… Pas plus qu’à l’artisan du grand œuvre de la chanson poétique francophone. Vous pensez que je délire en écrivant ces mots ? Alors, sachez que trois autres fous étaient victimes de cette même fièvre : Jean Ferrat, Léo Ferré et Claude Nougaro qui voyaient en Vasca le Rimbaud de la chanson française – pas né pour rien à Charleville-Mézières, le bougre ! Réincarnation en chanteur, vous croyez ?
Mon chant monte vers vos silences Entre la flamme et le couteau Du plus lointain de mon enfance Je suis un cri hors du fourreau Les mots sont des soleils futurs Qui roulent d’écho en écho De branche en branche vers l’azur Je suis un arbre plein d’oiseaux…https://www.youtube-nocookie.com/embed/ShoJXivwLLY?rel=0&wmode=transparent
Bref… « Bon, ouais, d’accord, mais si tu me l’avais dit, j’aurais pu préparer quelque chose…
– T’inquiète, on va parler poésie et chanson, et puis métier aussi, médias et chanson, tu connais tout ça par cœur… »
Alès, première « grande » ville à proximité de Tharaux. Moins de 23 km à vol d’oiseau… Tharaux-Antraigues-sur-Volane, pas bien loin non plus, ce qui explique d’autres mémorables déjeuners ou dîners en compagnie de Jean Ferrat… Mais c’est une autre histoire.
Alès, donc. Un centre culturel. Personnel sympathique et compétent ; public nombreux et curieux… Nous voilà, Jean et moi, sous le feu nourri des questions après un exposé de l’auteur-compositeur sur son art et un autre de ma part, tout à fait improvisé, sur l’état des lieux de la chanson vivante. Tout se passe bien… et se prolonge jusqu’en fin d’après-midi. Plus question en effet de reprendre la route. À l’issue de la rencontre, les organisateurs remettent un cachet à l’artiste, c’était prévu comme ça pour l’avoir mobilisé tout ce temps. Puis ils me tendent une enveloppe.
« C’est quoi ?
– Ben, c’est pour votre participation. Votre défraiement. On a été ravis de pouvoir compter sur votre présence, c’était très intéressant. »
Moi, un peu gêné… J’avais accepté par amitié pour Vasca. Pour le plaisir d’être avec lui et de confronter notre parole avec celle des amateurs de chanson présents. Pas pour encaisser quelques sous… « Ne refuse pas, me dit Jean, tu vas en avoir besoin, j’ai prévu un bon restau pour ce soir ! » Ah bon ?! Tout était prévu, décidément… Scrogneugneu !https://www.youtube-nocookie.com/embed/Q1r465RiAI8?rel=0&wmode=transparent
Et nous voilà vers vingt heures aux abords d’Alès. J’ai oublié le nom de l’établissement – pensez, c’était y a trente ans… – mais je peux vous dire que ça n’était pas du fast food de l’oncle Sam : au hit-parade de la gastronomie, on était au top de l’Hexagone ! Ça m’a rappelé une anecdote que m’avait confiée Vasca : « Pour moi, les grands cuisiniers sont des artistes, j’ai eu la chance d’en rencontrer quelques-uns et d’être invité chez eux : chaque fois, on a fait une véritable messe des papilles et de l’intellect, quelque chose de formidable ! » En fait, le malin avait trouvé le truc : il troquait un repas pour lui et sa chère Annie contre un spectacle. Chez les frères Troisgros notamment, à Roanne ; grandes pointures de leur art et aficionados de Vasca – honnêtes hommes, quoi ! Chez Bocuse aussi, à Lyon… « Monsieur Paul », mon rêve !
Bref, on se régale les papilles comme jamais. Jamais en effet, avec ma chère et tendre, on n’avait connu de cuisine aussi raffinée… Et quels vins ! Pas étonnant de la part de Vasca qu’il connaisse cette bonne adresse ; tout au contraire, même : n’avais-je pas conclu son dossier sur ce chapitre-là ? « La gastronomie, bien que tu n’aimes pas ce mot, disons la cuisine, apparaît comme quelque chose de très important chez toi : quand on partage un repas avec toi, on a un peu l’impression de célébrer une messe… Il n’était donc pas concevable de conclure ce dossier sans lui adjoindre une rubrique gastronomique !https://www.youtube-nocookie.com/embed/Ej1kQkUTC_A?rel=0&wmode=transparent
– Oui, pour moi c’est quelque chose d’important, mais comme faisant partie d’un ensemble, je n’aime pas l’isoler. Ça rentre dans le grand spectre des sensations, du physique, de la sensualité, comme l’amour ou la connaissance de la nature ; c’est tout à fait important, les papilles, cela fait partie d’une culture générale au sens vrai du terme. J’y trouve un plaisir réel, mais aussi une parcelle de vérité fondamentale. Je dirai même, pour plagier un peu Aragon, que la gastronomie est l’une des formes supérieures du désespoir. »
Vers la fin du repas – que dis-je, du repas ? du festin ! –, alors que le Chef vient nous offrir un digestif maison et converser un peu avec maître Vasca, Mauricette ouvre l’enveloppe contenant mon « cachet », qu’elle avait rangée dans son sac et que j’avais presque oubliée… Elle me montre discrètement le chèque… Pas possible, ils se sont trompés ! Grosse somme… Enfin, toutes proportions gardées. Disons qu’ils avaient compté le déplacement depuis Paris plus un hébergement, repas compris pour deux. Comme si tout avait été prévu de longue date.
C’était la première surprise. La seconde n’allait pas tarder à nous exploser à la figure avec la note finale. Pour le coup, c’était vraiment la douloureuse ! Je ne sais plus pour Vasca, habitué des lieux il devait être habitué à ça aussi, mais nous on a écarquillé les yeux en découvrant le résultat chiffré de nos agapes…
« Être gastronome, avait poursuivi le chantauteur dans Paroles et Musique, c’est faire et c’est consommer : j’aime faire la cuisine et j’aime la partager – parce qu’on ne consomme pas seul. Dans le fait de manger des plats élaborés, étonnants, il y a ce côté convivial, fraternel, qui est important ; c’est la fête qui conduit à une espèce d’ébriété, d’excitation nécessaire pour aller vers l’autre. Je ne suis pas en train de prôner les drogues dures [rires], ce n’est pas ça, je pense simplement que la gastronomie est un moyen privilégié pour s’évader de ce quotidien trop dur…
» Ce qui est monstrueux, parce que l’homme ne mérite pas d’être sanctionné à ce niveau-là, c’est que ça revient TRÈS cher ! »
Cher, très cher… Ô combien ! Ce soir-là, il a fallu qu’à mon cachet on rajoute un chèque conséquent. Si j’avais su, j’aurais proposé de revenir le lendemain à Alès pour une seconde conférence, histoire de compenser un peu la différence !
« La poésie fout l’camp, Vasca ! » te disait Léo… Peut-être, c’est à voir. Mais pas la mémoire. En aucun cas la mémoire. Ni le reste, invisible aux yeux, malgré le temps qui passe ; n’est-ce pas, ami, frangin, camarade…https://www.youtube-nocookie.com/embed/HWcLrmKK2zw?rel=0&wmode=transparent
NB. Vingt-six albums au compteur (le dernier, paru fin 2015, s’intitule Saluts !) et cinquante ans de « poèmes et chansons » rassemblés dans un ouvrage de 640 pages : La Concordance des temps (1964-2014). C’est peu de dire qu’il s’agit d’un ouvrage rare et d’une œuvre unique. Disques et livre à commander chez l’auteur.
VASCA AU PANTHÉON DE CHORUS : Pour mémoire, quinze ans après celui de Paroles et Musique, aujourd’hui épuisé, nous avons consacré un autre dossier important à Jean Vasca dans le numéro d’hiver 97/98 de Chorus (avec Jean-Jacques Goldman en couverture). Curiosité : il s’agissait dans les deux cas du numéro 22. Il nous reste quelques exemplaires « collectors » de celui de Chorus (d’où est tirée la photo d’ouverture de ce sujet), que vous pouvez demander en « contrepartie » (voir le site d’Ulule pour les modalités) de votre contribution à l’édition de La mémoire qui chante.
Qu’en disant : pâle émondé à falloir Serait-il arbre à raser de savoir Même sans nom à porter pour son deuil Ne tenant aucun froid corps à son seuil
Au sang neuf Pas tout veuf
De feuilles disparues Tient quad-même à la rue
De maintes pluies Renoue sans bruit
Tout à l’an maintenant Plein allant mains tenant
En deux mille à l’an trois Deux mille en plein tout droit
Non de nom ô Pardon Noué même cloué même Platane est aussi don D’ombre pour tous qu’il aime
Au vrai n’est pas laid tant Sème aux pas haletants Tous ces sons qui résonnent En pente qu’il arraisonne Tous ces fils de lumière Qui ont connu les guerres
Voyez ces cœurs marqués aussi tendre à son bord
A l’écorce craquée qu’il ne peut avoir tord
Même si fut tirée ça a vrillé en vain Tue la vue mais retisse Cette foudre artifice La chair tenue au vin Les traits chantants – le bruit d’une nuit étirée
Pour lui frais sans renom Qui – au brillant – dit non
Du labyrinthe en murs Leur eau prise à la ronde Là dans sa halte est-ce Tu demeures au futur Si ivre en airs du monde Est-ce en silence qu’il gobe Cette lune à sa robe Lui si haut en finesse La sachant si cachée Au paravent déhanché Et ascète au bon nid Et saint au nom honni Platane platane
Veut – Se rêve Plus tout jeune Être roi Pourtant jeûne O sans toit Sans aumône Ni relève Tient le trône Explosant fixe En croisées d’X
Lors il médite en plis Et – encore – se déplie
D’ailleurs – si sonore et bruissant Qu’il – ô Sans son vert port luisant Se dépièce à sa lune En bien peu de vraie tune
Lui Tant-pis Si Deux pies lui volent son haut vol Tout en proie A sa croix Sait l’étroit Casser droit
Et les pierrots tous rêvassant A lui – ô Depuis acquiesçant Lui qui luit Dans la nuit Se haussant s’assurant Tient tête Aux tempêtes Qui ravinent Aux racines Et s’affine A une lime Pare au sang des errants Ici reste tout en geste
Lui le pâtre Se met en quatre Du droit passant Evanescent A la lumière Contre la pierre
Et nul berger Dans sa vraie toile N’est bien âgé Cœur à l’étoile
Platane platane Ramifie en obliques Comme tout en musique Rissolant à la lune Avec aucune tune Sis à ses régiments Alignés sous l’argent Qui même ne dénoue Ni même ne dément Les pas heurté des gens C’est lui qui reluit Et déroule Là – les ombres Toutes en nombre A son tronc Aussi rond Qu’alors -saoules – S’en vont et s’enfuient
Et ceint qu’en ses lances Scellées au silence Il bouge – entre en transe Quand l’éclair le tanse
Vrai – il le sait laid Tout le faux parler
Tout épris à l’eau Il la sent S’en ressent D’ailleurs A l’heure Quand se colle à sa peau Le vrai homme d’hiver Il le sait si Sisyphe Qu’à son or incisif Tempère au corps la pierre Liée sans y paraître Au bien de tout son être Il le sait si bien d’ailleurs Que laissé tout-à-l’heure A son vif sang resserre Sève aux maisons qu’il serre
Pourtant qu’à l’or mort – là – qui tremble aux liens Lui – sans feuilles au corps – là – ça semble bien
Aux hauteurs – tant et tent Fuit-il vraiment ces temps ? Dans son tronc non caché Pourtant si peu haché Haut – n’est pas relâché N’est pas si déhanché Que livré aux fumées Il n’essaye de humer Rissolant les couleurs Avalant les odeurs
Mais le sait-on jamais Était-il désarmé Quand – par le vent s’ôtaient Tous ses moufles De ses doigts tout aux toits : Tout son souffle On le sait pour l’instant : Non scié – patientant
Sous l’élan de la bise Soulevant son étai Il se noue aux incises Pour aller à l’été
Il sait – épris pour l’homme Si dessous sa couronne Les sons ne virent plus Qu’alors il ne plaît plus
O lui sec – froid aux pluies Et qui a mal relui Depuis le gel du temps Donc si peu enchantant A l’œil et aux oreilles Pour les seuils et pour les veilles Là – ces gens qui s’entêtent A l’oubli et aux fêtes Frisent l’instant sans voir Qu’après ils broient du noir
Hors blé sûr – lui moissonne A ras l’eau – ne s’assome Pas aux ultimes rixes Des passants qui – eux – crient Après a voir tant ri A la lune il se fixe
Là – vieux soldat roué Il roule tout noué Les écorces du temps Qu’il envoie patientant A la lèvre de la rue Pour qu’elles se diluent Dans le sang des bohèmes Que par sa peau il sème
Aux ombres sans soleil Passe encore à la veille Lui qui assise en terre Le savait qu’il s’entaille Tout à l’heure au travail Hombre ! Vertus au vert !
Ici aux traces De neuves eaux fortes Au millénaire Que lampa d’air L’ambre des portes
Ciselant place
Et là même le bois neuf Tout vidé de son stuff Nage en stuc d’acajou Figé aux joues qui jouent Dans rue ivre en sueur Qui passe à sa lueur Au guet Si gai Le souffle d’autres arbres S’asphyxie dans le marbre
Et de la sorte Non abaissé Oui c’est béat Mais sans céder Tout le temps là Qu’il a brassé Tout l’art aux dés Jetés aux portes
Quand bon an – mal an Ceint quant au ligné Si près en sa hotte Platane se prend Tout souligné Là dans les bottes Aux brefs cadrans Tâche aux talents De tout reprendre :
Nef – vagues au son Nectar en cendres Anse des vrilles Piques d’éclair Mouches de ville Lucioles en l’air
Et le tout si saillant Pris juste dans le vent Quand soupe l’horizon Au reflet naufragé Aux rigoles encagées
L’ocre jaune des fêtes Lui remonte à la tête
Mais n’est vraiment de marbre Ce si beau gréement d’arbre Brassant le jeu sérieux Suspendu même aux yeux Avec lui même mieux Etre alors en son lieu
ça ne l’effeuille plus Cent maux quand il a plu
C’est encore lui qui s’ensonge De par son cœur qui le ronge Si on a faim de savoir Où et quand – en quel vouloir Le monde roué lui mange Si à ses trous ça s’arrange
De la ronde aux plein minuits L’essentiel Est-ce qui luit A l’émoi donc aussi N’est plus vraiment rassis Qu’allant tout dépassé Les courants du passé O dés-lors retrouvé Au jeu sache rêver Là en veille et autour Souffler comme une tour Allé roquer en roi Ce qui ne tient qu’à toi Arbre piquant au cœur vu Mettre en échecs le su
Dame à la main Danse en témoin Pour lendemain But main pour maints
Qu’encore la finesse En sa halte renaisse : Pour aimer bien les fleurs Tout attendre vers l’heur
Sachez le à l’émoi Allez avant le mois Aux dés que tout raconte Ça ira sans éponte Le désir de tout art : Arbre de part en part Même si tout en vie Haït la belle envie
Platane platane Soustrait à l’horloge Qu’il suit dans sa loge Il tient au carrefour A tendre au temps qui court
Mais n’est pas si sourd En émois : vœux lourds A plier la loi Verrait bon aloi Et – ô Pas en rien – Saurait bien en corps Soleil à ses feuilles Froisser un peu l’or jusque sur les seuils
Mais bien tenus liens Corps branchés branchés Qui – noués penchés Moins seuls – sans complainte Déhancheraient crainte Pour fraîcheur qui mord Tendent ce qui tord
Allons donc au pas Mettre tout au vert Pour qu’en un grand tas La chanson resserre Le temps de l’arbre Si noué au sabre Du temps de tout homme Sans qu’elle ne s’assomme
D’ailleurs il suffit Qu’à lui on se fie Aller à la fête Qu’elle vienne en tête
Se met en quatre Le bon vieux pâtre Froissé au vent Bien en avant Et chuchote – il Le cœur bien en ville N’est pas dévot Pour l’or du veau
Tout à toi cet émoi Au silence d’hiver Distanciés : toits divers Vois bien : dans quelques mois Ses branches bien vrillées Connaissent l’ouvrier Pas de culte pourtant En cet occulte temps Rivé neuf tout au temps Veille pour le printemps
En ondées le suprême C’est là don que l’on aime Déliant bien son tout
Et passant tout à coup Vois encore en envois Verticale en sa voix Une âme sans relique Fait battre ondes en musique
Oui l’arbre assez tique à sa touche Quand le vent hurle dans sa bouche
Forcé ainsi à l’art Il le redonne à part Passant tout en lumière Passant tout fin aux pierres Les sons et le silence Patience et impatience Les saisons et les guerres
Et là pose sa paix Quelqu’un pour la happer Un peu soustrait du monde Comme éperdu – il sonde S’accordant au désir Ne joue pas le beau sire Plante là le décor Tout en corps et encore En cent comme en deux mille Toussant la pluie en ville Il songe là tout pile Son destin sur ses cils
Son air est sans raison C’est son nerf la maison
Platane – si tu t’embêtes On te rase la tête Reste là toi – au vent Reste là toi – si savant Attention Pour passion.