Un champ d’îles
Savoir ce qui dans vos yeux berce
Une baie de ciel un oiseau
La mer, une caresse dévolue
Le soleil ici revenuBeauté de l’espace ou otage
De l’avenir tentaculaire
Toute parole s’y confond
Avec le silence des EauxBeauté des temps pour un mirage
Le temps qui demeure est d’attente
Le temps qui vole est un cyclone
Où c’est la route éparpilléeL’après-midi s’est voilé
De lianes d’emphase et fureur
Glacée, de volcans amenés
Par la main à côté des sablesLe soir à son tour germera
Dans le pays de la douleur
Une main qui fuse le Soir
À son tour doucement tomberaBeauté d’attente Beauté des vagues
L’attente est presque un beaupré
Enlacé d’ailes et de vents
Comme un fouillis sur la bergeChaque mot vient sans qu’on fasse
À peine bouger l’horizon
Le paysage est un tamis soudain
De mots poussés sous la luneSavoir ce qui sur vos cheveux
Hagard étrenne ses attelages
Et le sel vient-il de la mer
Ou de cette voix qui circuleAbandonnés les tournoiements
D’aventure sur les tambours
L’assaut du sang dans les plaines
Son écume sur les HautsAbandonné le puits de souffrance
La souffrance au large du ciel emporte
Dans la foule des fromagers
Sa meute de mots et sa proieAbandonnée tarie la mesure
Démesure des coutelas
Cette musique est au coeur
Comme un hameau de lassitudeBeauté plus rare que dans l’île
Ton grand chemin des hébétudes
Va-t-il enfouir son regard
Dans la terre, humide douceLes hommes sortent de la terre
Avec leurs visages trop forts
Et l’appétit de leurs regards
Sur la voilure des clairièresLes femmes marchent devant eux
L’île toute est bientôt femme
Apitoyée sur elle-même mais crispant
Son désespoir dans son coeur nuEt parmi les chants de midi
Ravinés de sueurs triomphales
Sur un cheval vient à passer
La morte demain la PitiéL’île entière est une pitié
Qui sur soi-même se suicide
Dans cet amas d’argiles ruées
Ô la terre avance ses viergesApitoyée cette île et pitoyable
Elle vit de mots dérivés
Comme un halo de naufragés
À la rencontre des rochersElle a besoin de mots qui durent
Et font le ciel et l’horizon
Plus brouillés que les yeux de femmes
Plus nets que regards d’homme seulCe sont les mots de la Mesure
Et le tambour à peine tu
Au tréfonds désormais remue
Son attente d’autres rivagesL’après-midi le Soir les masures
Le poing calé dans le bois dur
La main qui fleurit la douleur
La main qui leva l’horizonSur vos chemins quelle chanson
A pu défendre la clarté
Sur vos yeux que l’amour brûla
Quelle terre s’est déposéeOutre mer est la chasteté
Des incendiaires dans les livres
Mais le feu dans le réel et le jour
C’est ce courage des vivantsIls font l’oiseau ils font l’écume
Et la maison des laves parfois
Ils font la richesse des douves
Et la récolte du passéIls obéissent à leurs mains
Fabriquant des échos sans nombre
Et le ciel et sa pureté fuient
Cette pureté de rocaillesIls font les terres qui les font
Les avenirs qui les épargnent
Ô les filaos les grandissent
Sur les crêtes du souvenirMulets serpents et mangoustes
Font ces hommes violents et doux
Et la lumière les aveugle
La nuit au bord des routes colonialesToute parole est une terre
Il est de fouiller son sous-sol
Où un espace meuble est gardé
Brûlant, pour ce que l’arbre ditC’est là que dorment les tam-tams
Dormant ils rêvent de flambeaux
Leur rêve bruit en marée
Dans le sous-sol des mots mesurésLeur rêve berce dans vos yeux
Des paniques des maelströms
Plus agités que la brousse profonde
Lorsque passe le clair disantBeauté sanguine des golfes
Ô c’est une plaie une plaie
Où danse le ciel, grave et lent
De voir des hommes nus et telsEt l’île toute enfin repose
Dans le chaud des maturités
Mûr est le silence sur la ville
Mûre l’étoile dans la faimCe qui berce dans vos yeux son chant
Est la parure des troupeaux
L’herbe à taureaux pour les misaines
Le dur reflet des sels au sudRien ne distrait d’ordre les vies
Les hommes marchent les enfants rient
Voici la terre bâtée, consentante
De courants d’eau, de voiluresQuelle pensée raide parcourt
Les fibres les sèves les muscles
De la douleur a-t-on fait un mot
Un mot nouveau qui multiplieCelui qui parmi les neiges enfante
Un paysage une ville des soifs
Celui qui range ses tambours ses étoffes
Dans la sablure des parolesGuettant le saut des Eaux immenses
Le grand éclat des vagues Midi
Plus ardent que la morsure des givres
Plus retenu que votre impatience d’épineCelui que prolonge l’attente
Et toutes les mains dans sa tête
Et toutes splendeurs dans sa nuit
Pour que la terre s’émerveilleIl accepte le bruit des mots
Plus égal que l’effroi des sources
Plus uni que la chair des plaines
Déchirée ensemencéeSa clarté est dans l’océan
Dans la patience que traîne
Vers où nul oeil ne se distend
La flore d’îles du LevantCe qui berce en vos yeux son chant
Pour atteindre le matin ô connue
Inconnue c’est la chaleur fauve
Du Chaos où l’oeil enfin toucheÎle ces requins vos fumures
Le charroi de votre sang l’homme
Et sa colline la femme et les cases
L’avenue dans ces miroirs les MainsEst-ce oiseau, une racine qui gicle
Est-ce moisson, l’amitié grandie de la terre
La même couleur éclabousse, caresse
La souffrance est de ne pas voirBeauté de ce peuple d’aimants
Dans la limaille végétale et vous
Je vous cerne comme la mer
Avec ses fumures d’épavesBeauté des routes multicolores
Dans la savane que rumine
L’autan plein de mots à éclore
Je vous mène à votre seuilÉcoutant ruisseler mes tambours
Attendant l’éclat brusque des lames
L’éveil sur l’eau des danseurs
Et des chiens qui entre les jambes regardentDans ce bruit de fraternité
La pierre et son lichen ma parole
Juste mais vive demain pour vous
Telle fureur dans la douceur marine,Je me fais mer où l’enfant va rêver.
Edouard Glissant
Et sur ce caillou isolé où j’île, tout de délicatesse et sans vernis, où le moindre souffle est intention, non de plaire mais d’apporter plaisir, gage de tendresse, amoureuse affection qui arme les plates complaisances en béton de preuves en différence intangible et fondamentale entre l’acte et les belles paroles, je me fais relation à l’Autre en pudique nudité, ainsi conscient de m’exposer à la méchanceté. Je n’étais que poussière, avant d’y retourner je me suis fait pierre.
Niala-Loisobleu – 2 Avril 2017
Jour : 2 avril 2017
TOUJOURS POUR LA PREMIERE FOIS
TOUJOURS POUR LA PREMIERE FOIS
Toujours pour la première fois
C’est à peine si je te connais de vue
Tu rentres à telle heure de la nuit dans une maison
oblique à ma fenêtre
Maison tout imaginaire
C’est là que d’une seconde à l’autre
Dans le noir intact
Je m’attends à ce que se produise une fois de plus la
déchirure fascinante
La déchirure unique
De la façade et de mon cœur
Plus je m’approche de toi
En réalité
Plus la clé chante à la porte de la chambre inconnue
Où tu m’apparais seule
Tu es d’abord tout entière fondue dans le brillant
L’angle fugitif d’un rideau
C’est un champ de jasmin que j’ai contemplé à l’aube
sur une route des environs de Grasse
Avec ses cueilleuses en diagonale
Derrière elles l’aile sombre tombante des plants dégarnis
Devant elles l’équerre de l’éblouissant
Le rideau invisiblement soulevé
Rentrent en tumulte toutes les fleurs
C’est toi aux prises avec cette heure trop longue jamais
assez trouble jusqu’au sommeil
Toi comme si tu pouvais être
La même à cela près que je ne te rencontrerai peut-être
jamais
Tu fais semblant de ne pas savoir que je t’observe
Merveilleusement je ne suis plus sûr que tu le sais
Ton désœuvrement m’emplit les yeux de larmes
Une nuée d’interprétations entoure chacun de tes gestes
C’est une chasse à la miellée
Il y a des rocking-chairs sur un pont il y a des branchages
qui risquent de t’égratigner dans la forêt
Il y a dans une vitrine rue Notre-Dame-de-Lorette
Deux belles jambes croisées prises dans de hauts bas
Qui s’évasent au centre d’un grand trèfle blanc
Il y a une échelle de soie déroulée sur le lierre
Il y a
Qu’à me pencher sur le précipice et de ton absence
J’ai trouvé le secret
De t’aimer
Toujours pour la première fois
André Breton « L’air de l’eau »
Tes yeux devenus sans heures marquent le tant des aiguilles de tes cils, Tic-tac, mon coeur fait coucou tendu, La transe apparence se concentre d’une simple apposition des paumes pour te faire venir au clos de mes paupières, Les contrées par où défilent les mots tus sont plaines de semences, N’as-t-on pas vu les terriers organiser des journées portes-ouvertes ? Dans l’invisible lumière des hésitations réitérées au bord des jours, les trèfles à quatre-feuilles n’ont qu’une suspension tributaire de la solidité de la tige, trois points c’est tout, Sur les corniches de mes vertiges je varappe à tes parois avec tes seins tenus à demain en balancier,Toi au bout du long couloir sombre des nuits approche des rose matins, Nos lèvres ont soif, les longues traversées sèchent la langue de leur sel au centre du silence que le vent porte au centre de nos pensées, Voic l’herbe folle de la comète, Nous nous y accrochons de nos dos renversés, Allongés sur le m’aime drap, nus, au fil de notre odyssée la rivière méandre sans ahaner,
Je te laisse ma main
A tremper dans ton encrier
Niala- Loisobleu
2 Avril 2017